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Cet autre qui grandissait en moi - Tome I & II L’homosexualité à l’adolescence pas facile à vivre. Toutes sortes de questions se bousculent dans la tête de Bryan mais à qui les poser ? Il est prêt à le nier avec une énergie farouche. Seulement voilà, faire taire ses sentiments n’est pas qu’une question de volonté.

Homophobie : La peur de l'autre en soi - Si tu avais été...

Alexis Hayden

      Si tu avais été... - Tome 2

 

Couverture Tome 2

 

Extrait du chapitre 19.


 

Yohann vint souvent chercher Kévin à la sortie du lycée. Comme la nouvelle se répandait, la vie de Kévin tourna vite au cauchemar. Il était insulté et maltraité par les autres élèves. En classe, il devint la cible et recevait des projectiles. Il finit par s’installer seul au dernier rang, au fond de la salle.

 

Un après-midi, un terminal nommé Laurent, réquisitionna une petite troupe pour « casser du pédé » et réserver à Kévin un accueil particulier. Ils étaient une dizaine de courageux à se mettre sur deux rangs dès son arrivée pour lui faire une haie d’honneur, en tapant dans les mains et en scandant : « A poil, à poil ! » Quelques filles les rejoignirent. Kévin continua son chemin comme si de rien n’était lorsqu’ils le bousculèrent. L’un deux lui fit un croche-pied. Kévin perdit l’équilibre et tous se jetèrent sur lui pour le déshabiller. J’assistai à la scène, pétrifié et incapable de l’aider. Je courus prévenir les surveillants en leur demandant d’intervenir avant qu’il ne soit trop tard. Ils se précipitèrent pour faire cesser le lynchage. Kévin se débattit mais ne voyait plus rien, à moitié nu, le pull relevé sur la tête et le caleçon sur les chevilles. Les surveillants le conduisirent à l’infirmerie.

J’étais le seul à avoir tenté quelque chose pour l’aider. Quand on assiste sans rien faire, c’est qu’on est d’accord, non ? Un élève vint vers moi en disant :

-          Toi aussi maintenant, t’es pédé ?

Je le fixai bien dans les yeux, sans rien répondre. Allait-il me bousculer ? Je n’attendais que ça pour lui éclater la gueule, pour lui montrer que le petit pédé que j’étais savait se battre. Qu’est-ce que j’aurais aimé ! Je ne pouvais pas m’en prendre à tous ceux qui avaient agressé mon amour mais s’il y avait un volontaire pour faire le malin et lever la main sur moi, j’étais prêt à me défouler. Je ne sais pas s’il le lut dans mon regard, s’il jouait un rôle et faisait semblant, tout ce que je sais, c’est qu’il baissa les yeux et s’en alla. Dommage ! Mon mépris pour toute une partie de l’humanité, allait croissant. Je détestais ça mais impossible de m’en détacher puisque ça ne venait pas de moi. Je désespérais devant l’incompréhension des autres.

Informée, Martine vint chercher Kévin au lycée. Il mit plus de quinze jours avant de reprendre les cours. Je vins le voir chez lui, il refusa de m’ouvrir.

Entre-temps, le proviseur, accompagné d’un psychologue, passa dans chaque classe pour tenter d’expliquer la gravité de ce geste et parler d’homosexualité, de tolérance, de solidarité, et de toutes ces conneries qu’on ne devrait pas apprendre, qui devraient être innées chez l’homme mais qui ne le sont pas. La peur est innée, mais pas le courage… pourquoi ?

Je n’étais pas fier de moi, je n’avais rien fait pour aider mon ami. Lorsque Kévin reprit les cours, le proviseur lui demanda s’il avait porté plainte, craignant ainsi pour la réputation de son lycée et pour son avancement peut-être aussi. Mais Kévin ne le fit pas.

 

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